jeudi 22 mars 2018

Amour et trahison (#balance ta pute), un article d'Annie Chapman


             Les pompes funèbres et leurs Thanatos, une belle histoire… Ou pas. Dans cette union forcée, le Thanato tient le rôle de l’épouse docile et résignée qui sait que toute tentative de rébellion la mènera à la répudiation. Pourtant, au-delà du rapport de force, on finit par s’attacher.

            Le Thanato peut alors se transformer en véritable geisha, devançant même les désirs de son « client ». Faire les mises en bières, installer les corps en salon, remplir les bénitiers… Tout ça après avoir fait place nette en dégageant les catafalques, chariots, jupes de cercueils, sans parler des restes de fleurs qui jonchent le sol.

             Quel bonheur de se plier en quatre, ah mais là l’expression prend tout son sens, pour le combler. Et quelle joie lorsque le Thanato récolte les fruits de son dévouement, sa récompense : Une tasse de café.

             Mais comme dans toute histoire passionnelle, l’amour peut brusquement faire place à la haine. Il suffit d’un rien, un grain de sable dans l’engrenage et la bonne épouse louée pour ses vertus devient dans les yeux du mari outragé, une catin de bas étage qu’il écrase de son mépris.

« Je t’aime petite moukère, quand tu accoures lorsque je te siffle, je t’aime ma gourgandine, quand tu transformes un corps en or, je t’aime mon asphalteuse, quand tu patientes en attendant les vêtements, quand tu réponds toujours que ça ne te dérange pas. J’aime cette façon que tu as de dissimuler tes sentiments et de toujours me sourire et par dessus tout j’aime entendre le grincement de ta mâchoire quand tu me dis « pas de souci ». 
Mais ne rêve pas trop, parce que tu le sais comme moi, au moindre problème, je te balancerai comme un kleenex usagé. Si je dois me couvrir, pas une seconde je n’hésiterai à te livrer aux flammes telle une sorcière. 
C’est la dure loi de la nature, ma petite souris. Mais console-toi, fleur de bitume, car les prostituées nous devanceront au paradis.  »

jeudi 18 janvier 2018

Comment s’occuper d'un défunt, guide pour le personnel hospitalier. Un article d'Océane Meresse-Labrell


Votre travail consiste à vous occuper des vivants, infirmier(ère), aide soignant(e), vous vous occupez des personnes et les aider à guérir est votre quotidien. Malheureusement, il arrive qu'une personne décède, et votre formation s’arrête là.
J'écris cet article pour palier ces “lacunes “, et vous expliquer ce qu'est une véritable toilette mortuaire. (protocole enseigné en école de Thanatopraxie). Je l’écris aussi suite à de nombreuses interrogations de la part du personnel soignant.
Bien évidemment, j’y apporterai des détails, car il y a des choses que vous ne pouvez pas pratiquer si, justement vous n'êtes pas Thanatopracteur.
Je vous indiquerai les pratiques à proscrire et les bons gestes.
Je vous dirai aussi, le minimum à faire, si vous n’avez pas le temps, et/ou, si vous considérez que toucher à un défunt ne fait pas partie de votre travail.

Je rappelle que ce présent article est un article indicatif, je l'écris de mon propre chef avec l’aval de certains Thanatopracteurs, mais ce n'est pas un protocole déposé au ministère de la santé. Je précise également, que cet article n'est en aucun cas écrit pour que vous fassiez le travail à notre place. Nous intervenons plusieurs heures après le décès, et certains gestes à pratiquer de suite sont nécessaires. Il est très probable que la famille veuille voir son défunt avant notre intervention et nous ne voulons pas que ce soit dans de mauvaises conditions.

Quand on décède,

Je vais vous faire un petit résumé de ce qui se passe quand une personne décède. Tout d’abord le système immunitaire n’étant plus actif, toutes les bactéries présentes dans et sur notre corps ne sont plus régulées par celui ci. La prolifération des bactéries commence alors, dans le corps et sur la peau. La rigidité cadavérique s’installe en partant de la nuque, puis s’étend sur tout le corps. Le sang stagne dans les veines, il n’y a plus rien dans les artères. Les veines étant très fines, elles ne sont plus étanches et les globules rouges migrent pour aller se positionner dans les parties déclives du corps, colorant ainsi la peau de rouge/bleu/noir. Nous appelons ça les lividités cadavériques. Le premier signe visible de la putréfaction est la tache verte abdominale, se situant dans la zone iléo-caecale. Ce sont les intestins qui commencent à se putréfier, et avec la prolifération bactérienne des gaz se créent, ce qui fait gonfler l’abdomen de façon parfois significative. Cela peut provoquer une pression dans le corps, qui pousse différents fluides biologiques à s’échapper. (poumons estomac vessie intestin). La température diminue également (1 degré par heure jusqu'à se stabiliser avec la température de la pièce) et un dernier phénomène très important, le corps se déshydrate.

La toilette mortuaire

Tout d’abord et avant de faire quoi que ce soit, procédez à une désinfection complète du corps. (n'oublions pas les yeux le nez la bouche, les mains et les parties basses).

Effectuez ensuite une lecture du corps, il faut vérifier les points d’injection, retirer les cathéters si il y en a et appliquer des pansements. Si le défunt a de l'œdème au niveau des membres, enroulez une alèse autour de chacun d’entre eux, puis enveloppez avec du papier étanche (type cellophane, si vous en avez).

Procédez ensuite au méchage des orifices, (nez, bouche, parties intimes. Les oreilles ne sont pas un orifice !). Utilisez du coton pour soin, 100% hydrophile. Ne vous servez pas de matière rugueuse comme les compresses, car cela abîme les muqueuses et les capillaires, notamment du nez, et peut provoquer des écoulements.

Pratiquez une ligature de bouche, (uniquement si vous avez fait une formation avec un Thanatopracteur !), sinon placez une mentonnière. Il faut qu'elle soit bien contre la peau, et bien calée sous la mandibule. Elle doit être à la bonne taille. Si vous n’en avez pas, prenez un linge enroulé, et bloquez-le sous la mâchoire. Une fois la rigidité cadavérique apparue, vous pouvez la retirer. Si vous avez de la vaseline ou de la crème hydratante, vous pouvez en appliquer sur les lèvres et ainsi prévenir leur dessèchement et éviter de vilaines marques. S’ il y a un appareil dentaire, replacez-le dans la bouche du défunt après l’avoir désinfecté.  

Pour les yeux, posez des couvres œil recouverts  de crème ré-hydratante si vous en avez. Sinon, fermez les simplement sans rien appliquer d'autre.

Procédez ensuite à l’habillage avec les  vêtements apportés par la famille.N’oubliez pas  de mettre une couche.

Pour le rasage, procédez avec précaution. Bien tendre la peau, et ne pas oublier d'utiliser de la mousse à raser. Évitez de le faire si possible, car le rasage crée des micro coupures, et avec la déshydratation du corps ces micro coupures apparaissent comme des taches brunes disgracieuses et impossibles à effacer. Une fois le rasage terminé, appliquez de la crème ré-hydratante sur toute la région rasée pour prévenir le dessèchement.

Si la défunte a du maquillage, rouge  à lèvre par exemple, n'hésitez pas à l’appliquer. Vous pouvez également coiffer le défunt, n’oublions pas le nettoyage des ongles.
N’oubliez pas de placer correctement les mains; doigts croisés pour les catholiques, main droite sur main gauche pour les protestants, main gauche sur main droite ou les bras le long du corps pour les civils.  

Positionnez le corps droit, la tête surélevée par rapport au reste du corps. Ca permettra au sang de s’échapper un maximum de la tête et ainsi de limiter les lividités cadavériques au niveau des oreilles.

Laissez ou apposez un bracelet d’identité.

Voici ce qu’est une toilette mortuaire complète.

Ce qu’il ne faut surtout pas faire

  • L’oeuf de pâques : Je m’explique, c’est une bande enroulée autour de la tête qui sert à maintenir la bouche fermée. Le problème de  la bande est qu’elle fait  des marques, En effet, sur une personne décédée, la tonicité et l’élasticité de la peau n’existent plus. La bande laisse donc des traces, qui même en massant sont très difficiles à effacer, surtout si le corps à été placé un moment en case réfrigérée.

  • Le coton sous les paupières : Le principe est bon, mais il ne tient pas compte de la déshydratation du corps. Passé quelques heures, le coton sous la paupière va faire une marque.

  • Le scotch ou les strips sur les yeux : Le problème est quelorsqu’ils collent trop bien, en les retirant on arrache des cils et des sourcils. Il y a aussi un risque d’abimer la peau, et pour être honnête ça ne sert à rien.

  • Scotcher la couche : Scotcher n’évitera pas les matières fécales de s’échapper et ne génère que des complications lorsqu’ils s’avère indispensable de changer la couche.

  • Les fenêtres ouvertes : Si l’odeur vous incommode, aérez deux minutes la pièce puis refermez. En effet, vous risquez d’attirer des insectes nécrophages, comme les mouches par exemple. De plus, l’oxygène et la lumière du jour accélèrent la putréfaction du corps.

  • Placer le défunt à même la table réfrigérée : dans plus de la moitiée des cas, celle ci est mal réglée, ou fonctionne mal. Mettez deux à trois couches, de tissu/draps, pour éviter la congélation du corps. (oui oui, c’est extrêmement régulier)

  • Laisser le radiateur allumé : Il faut impérativement couper le chauffage et mettre la clim s’il y en a une.

  • Laisser la bouche ouverte :  La peau des joues se détend, et puisque la peau n’a plus d’élasticité, l’ouverture prolongée génère des plis lorsque nous procédons à la fermeture de bouche -

Les petits plus

Nous préférons retirer nous même les pacemakers. En effet, bien souvent et surtout lorsque nous procédons à un soin de conservation, la suture non appropriée pour un défunt génère ainsi d’importants écoulements puisque non étanche. C’est pourquoi nous le faisons en fin de soin de conservation. Sachez que, crémation ou inhumation, la loi reste la même. Il faut retirer le pacemaker et il est très important de noter sa présence sur les certificats de décès.

Sachez que s’il n’y a pas de certificats de décès, ni les pompes funèbres, ni les Thanatopracteurs ne peuvent intervenir. C’est donc un délai supplémentaire pour la famille durant lequel le défunt n’est toujours pas pris en charge… (je souhaite fortement que les infirmières aient le droit de réaliser des certificats de décès. Déjà cela irait plus vite, ils seraient très certainement plus lisibles, la partie qui doit être scellée le serait réellement et enfin, ils seraient mieux remplis)

Les pompes funèbres n’ont pas le droit de facturer à la famille une toilette mortuaire que vous avez effectuée. J’entend par là que si vous avez fait une toilette mortuaire complète. Il se peut dans certains cas, que les pompes funèbres refassent appel à un Thanatopracteur pour fermer la bouche, mécher, mettre des couvres oeils, changer la couche etc… Il ne faut  pas faire l’amalgame.

Je suis la plus heureuse du monde lorsque  des poches neuves accompagnent les défunts qui présentent une colostomie.
Il y a beaucoup de Thanatopracteurs indépendants qui proposent des formations pour les élèves infirmiers, les agents mortuaires, les pompes funèbres, le personnel hospitalier... Je sais que les budgets des hôpitaux sont hyper serrés, mais demander à vos professeurs/hiérarchie ne coûte rien…

Utilisez du désinfectant, et non pas de l’antiseptique. L’antiseptique préserve notre flore naturelle, notre système immunitaire… Une fois décédé, cette même flore prolifère de façon anarchique, mute parfois, de même que les mauvaises bactéries. Il faut donc un désinfectant.

Et si…

Et si vous savez qu’il y a un soin de conservation, ou que vous ne voulez pas vous occuper du défunt parce que vous considérez que ce n’est pas votre job, ou que vous n’avez pas le temps (ce qui se comprend), faites juste en sorte que le corps soit droit, tête surélevée par rapport au reste du corps, et calez la bouche pour qu’elle reste un maximum fermée.
Ou ne faites rien du tout….